Hey toi, là!
Oui, toi qui t’enfuis en catimini comme si tu avais le monde aux trousses, toi l’année 2020… t’en vas pas comme ça!
C’est un peu dommage de partir sur tant de rancœurs, non? Je le vois à ta tronche, là, que tu vas prendre ta place de « l’année maudite par toute l’espèce humaine » en pleurant. Tu n’as même aucun doute sur le fait que le trophée va quitter les bras de 1945 pour atterrir dans les tiens, n’est-ce pas?
Hey, reste encore un peu, t’es bien pressée là… On est pas encore minuit. Chaque minute, chaque seconde compte. Allez, viens t’asseoir avec moi.
Oui, bon, d’accord, t’as pas été THE année. En même temps, t’en connais beaucoup des Saint Sylvestre où la planète entière célèbre l’harmonie et la joie? Nous ne sommes que des humains après tout.
Faut dire… quand même… t’y es pas allée de main morte, hein? Tu nous as tous bien secoués. Moi aussi, au passage. 2020, ça sonnait bien rond, bien parfait. Multiple de 2, multiple de 5, 35ans de vie, 10ans de couple, la quadrature du cercle presque parfaite. J’avais pas prévu de m’enfermer chez moi. J’avais pas prévu de craquer. J’avais pas prévu de prendre des médocs.
Oui, d’accord, c’est pas vraiment de ta faute. Ça traînait depuis longtemps. Enfin, t’as quand même été la goutte d’eau de trop qui a déséquilibré tout l’édifice!
Déséquilibre… tu sais, j’ai réalisé l’autre jour que quand on apprend à marcher, enfant, on désaxe notre corps. On se lance à l’aventure, on soulève un pied, on sent notre poids flotter, on essaie de se rattraper, on tombe, on se fait un peu mal… puis on se relève. Et de fil en aiguille, on découvre l’univers.
Tu me fais un peu penser à ça, 2020. Se déséquilibrer. Tomber. Se relever. Partir à l’aventure, sauter le pas. C’était une année en dents de scies, comme la silhouette des montagne – d’ailleurs, c’est l’année où j’ai redécouvert les Alpes. Curieuse coïncidence.
C’est sympa la montagne, n’est-ce pas? Oui, c’est vrai, on a pas pu en profiter tous les jours… mais les rares moments d’altitude que j’ai eu, j’ai l’impression que je ne les oublierais jamais. L’air pur dans mes poumons. Les centaines d’insectes qui s’échappaient sous mes pas. Les fleurs multicolores. La majesté des bouquetins. Le plaisir de sentir mon souffle aller et venir, l’oxygène descendre dans mes jambes et m’aider à m’élever là-haut, si haut… la sensation de liberté de cette vue splendide vue, main dans la main avec mon amour, sur un petit bout de toit du monde… Quelques jours mais tant d’intensité, tant de souvenirs!
Tu vois, y’a pas eu que du mauvais avec toi.
Je te disais que j’avais pas prévu de rester chez moi… mais j’avais pas prévu non plus de rencontrer des gens incroyables du fond de mon canapé ! J’avais pas prévu de comprendre ce que le mot « avec » veut vraiment dire. Avec les autres. Avec moi. J’avais pas prévu de découvrir de nouveaux chemins, cachés juste là, en moi… parfois un peu sombres, mais comme dit la papillote « on peut construire une maison avec les cailloux laissés en travers du chemin ».
J’avais pas prévu de me rencontrer. De me comprendre.
Si on est honnête et qu’on regarde 2019… où étais-je y’a un an? Aveugle à mon épuisement, je commençais à répondre à des appels à texte en me disant que si j’étais persévérante, dans quelques années je pourrai commencer un premier roman… Je n’osais pas croire en moi. Je dissociais mon imagination de mon intelligence. J’étais mal, j’étais si mal que je ne pouvais même pas le voir.
Bon, ok, tu m’as mis la tête face au miroir un peu brutalement. Je te soupçonne d’en avoir eu assez de me voir nier les démons et les anges qui me dévoraient. Ou d’avoir su que j’aurais le courage de tout traverser. Alors, tu m’as précipité dans le grand bain… et à mon plus grand étonnement, j’y ai trouvé des belles choses.
J’ai découvert que je pouvais compter sur les autres. J’ai découvert que je pouvais compter sur moi.
J’ai appris à me parler et à me comprendre. J’ai appris que ce n’est pas une fin mais un chemin infini.
J’ai compris que mes deux vies pouvaient se marier. J’ai compris que je savais être heureuse.
Si je suis honnête avec toi, je me sens mieux, ce 31 décembre 2020, qu’au 31 décembre 2019. Ça ne veut pas dire que tout est fini. Ça ne veut pas dire que plus jamais je ne serais malheureuse. Ça veut juste dire que j’ai pris conscience que seule moi peut faire mon bonheur. Et que mon bonheur peut éclairer les autres.
Tiens, 2020, que dirais-tu si je t’appelais « 2020, l’année de papier »? Ça sonne mieux que « l’année des masques », non? Parce que des papiers, j’en ai eu des beaux. J’ai tenu dans les mains ma première nouvelle publiée à compte d’éditeur, mon premier contrat. J’ai même dédicacé un petit paquet de livres ! En parlant de contrat, j’en ai signé un nouveau à mon boulot. Un qui ne compte que 4 jours travaillés par semaine. Pour me laisser le temps d’écrire. Parce qu’écrire, c’est une source de joie intense pour moi. C’est me reconnecter à celle que j’étais enfant. A ce que je suis, tout court. Et puis, écrire ne va pas sans lire. J’en ai tourné des pages, cette année! Je suis sortie de ma zone de confort. J’ai fait de belles et philosophiques découvertes. Lire transcende les frontières du temps et de l’espace. Et puis, du papier, j’en ai utilisé pour coucher les lignes de mon premier roman. Jamais je n’aurais pensé aller aussi vite! D’ailleurs, au départ, ce n’était pas un roman. Mais les pages s’ajoutent toutes seules… et moi je suis avec délice leur rythme discret.
Tu vois, t’es pas si mal! En fait, je me dis que tu auras toujours une place à part dans mon cœur. L’année de la bascule. Celle qui nous a déséquilibré, pour nous rapprendre à vivre. A apprécier les plaisir simple. A se découvrir. A prendre du recul sur ce monde qui tourne si vite. A ralentir. A vivre!
Ah, ça y est… c’est l’heure.
Tu vois, ça valait le coup d’attendre jusqu’au bout, non? Le secret de la vie, c’est que chaque seconde compte. Ce serait dommage d’en gaspiller quelques unes.
Au revoir 2020. Et merci!
Magnifique déclaration 🙂 « La vie c’est comme une bicyclette, il faut avancer pour garder l’équilibre »… et rien de tel qu’une main qui vous pousse un peu pour oser avancer… malheureusement, la souffrance est souvent une main, un moteur de changement, d’évolution bien plus puissant que l’envie… au début du moins, le temps de découvrir sa force et ses ressources intérieures et de réaliser que la plupart de nos peurs ne sont finalement que le fruit de notre imagination et de nos croyances personnelles, sur la vie, l’amour, l’argent… vive l’obscurité qui permet de mieux trouver la source de lumière et de mieux en savourer l’éclat <3 Le bonheur, ce n'est pas de ne vivre que des beaux moments… le bonheur, c'est le temps que tu accordes à ta joie. Bravo pour ce bout de chemin parcouru en 2020 ! Plein de bises ma belle !
Je pense que la vie a mis un coup de pied dans les fesses de chacun d’entre nous car c’était nécessaire. On a trop la tête dans le passé ou dans le futur et on n’oublie de vivre là maintenant alors que le temps est précieux. Cette année se termine merveilleusement pour toi j’en suis ravie. Crois en tes rêves et lâche prise. Bisous et à l’année prochaine. Solène.